dimanche 12 août 2012

Veronika décide de mourir...et elle se loupe ( sinon y aurait pas eu de film)


Souvent jugée négativement parce que le rôle de Buffy lui colle à la peau , Sarah Michelle Gellar se retrouve peu fréquemment sous le feu des projecteurs et peine à s'imposer au cinéma. Deux raisons à cela :

1° :le préjugé "Buffy" , qu'un doublage VF abominable & servant de censure voilée a violé mais aussi une absence de second degré des détracteurs qui semblent n'avoir jamais pris la peine de se plonger concrètement dedans, loupant au passage LA seule série qui racontait vraiment le passage de l'adolescence à celui du monde adulte, renvoyant Dawson et tous ses clones dans les limbes d'où ils n'auraient jamais dû sortir.

2°: l'absence de rôles marquants de la belle , cantonnée à des rôles de débile profonde ( au pif : Souviens-toi l'été dernier, l'horrible film Scooby-doo et sa suite tout aussi, si ce n'est plus, affligeante, etc.) quand ses rôles plus sérieux (et dans lesquels elle démontre son plein potentiel) prennent place dans des films ayant eu peu de succès comme Cruel Intentions ( rebaptisée, sottement, Sexe Intentions en VF,histoire d'attirer l'ado boutonneux et libidineux dans les salles) , film qui lui donne un rôle de géniale pétasse, manipulatrice au possible, dans une adaptation contemporaine des Liaisons dangereuses ( et il s'agit sans doute du meilleur film basé sur les activités du couple Merteuil/Valmont, rien que ça) ou encore dans des œuvres qui ne trouvent pas le chemin des salles de cinéma comme le crépusculaire Southland tales ,sorti directement en vidéo et qui offre pourtant une expérience de S.F hors du commun.

Verokika décide de mourir est de ces films que le grand public n'aura jamais eu l'occasion de découvrir sur une toile de cinéma. Et c'est bien dommage.



Le film est adapté d'un roman de Paulo Coelho ( auteur auquel j'avoue ne pas m'intéresser, les résumés de ses livres me faisant trop penser à du Marc Lévy ou du Guillaume Musso. ) qui raconte l'histoire de Veronika, jeune femme qui rate son suicide aux somnifères et se réveille internée. Là, elle apprend que son overdose a pourtant fait des dégâts irréparables sur son cœur et qu'elle va s'éteindre dans la semaine. Une semaine au contact d'autres âmes blessées va-t-elle suffire à lui redonner envie de vivre juste avant le grand saut dans la nuit noire ?

Allez, avec un pitch pareil, ça sent le larmoyant, le bien pensant et le moralisateur à plein nez.  
Tout faux ! 
En creusant un peu, on découvre que l'auteur a lui aussi été interné ( de force, par sa famille. Et dire que je trouvais la mienne bizarre… ) à de nombreuses reprises, sa vision de la chose se situe donc à des kilomètres des clichés habituels véhiculés dans les pourtant très bons Vol au dessus d'un nid de coucous ou The Jacket, par exemple. Point de pétages de plombs hallucinés ici (bon, il faut aussi le dire, ce n'est pas un asile de fous furieux non plus ).



Il ne s'agit pas ici de nous dire ce que nous avons le droit ou non de faire avec notre vie ( le suicide restant quelque chose d'encore très tabou dans notre société,voire victime d'idées tellement arrêtées et préconçues que ça en est parfois gerbant de suffisance),le sujet n'est pas là. Le sujet, c'est comment se reconstruire. Et c'est un "comment " multiple, pluriel !Car il n'y a pas de recette miracle. C'est un cheminent interne et propre à chacun. Les personnages peuvent trouver de l'aide mais ce sont leurs actes et leurs décisions qui les relanceront (ou pas) !

La réalisatrice Emily Young a travaillé autant la forme que le fond. Que ça soit la justesse des tonalités de l'image (vespérale ET lumineuse, comme la vie) ou la justesse de sa direction d'acteur.

Jamais on ne verse dans le mélodrame qui vous tire les larmes de force ! Non, avec subtilité, l'émotion vous attrape quand il le faut et provoque l'effet recherché (empathie, colère, tristesse).  Le tout est mené vers une conclusion surprenante dans un rythme lent, presque contemplatif mais jamais pesant et bénéficiant d'une fluidité rare : un tour de force que de dresser une route droite dans un film rendus sinueux par les tourments de ses personnages, patients comme médecins ( car on l'oublie trop souvent : il n'y a pas que les malades qui passent leur temps dans une institution ).



Personnages souvent interprétés avec retenue et où tout se joue autant dans leurs paroles que leurs regards et attitudes. Des personnages perdus, en attente d'une chose ou d'un évènement ( quitte à le provoquer) qui  leur fournira enfin le déclic et/ou la force de quitter ce monde cloisonné de l'institution et d'oser s'aventurer dans un univers sans frontière !
En partant d'un suicide, l'histoire nous offre en fait une parabole sur la liberté. La liberté de vivre, la liberté de faire des erreurs,la liberté de ne pas aimer ce que tout le monde aime,la liberté de tomber et de ne pas vouloir se relever tout de suite (ou même pas du tout),...

Une grande histoire ayant bénéficié d'une petite diffusion. 

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